Hana LAMOUCHI soutiendra sa thèse intitulée "Thé de fumier artisanal dans les pratiques de ferti-irrigation : Co-conception des voies d'amélioration avec les agriculteurs d'Afrique du Nord"
Le lundi 24 mars 2025 à 15h à l’Institut Agro Montpellier (2 Place Pierre Viala Campus la Gaillarde - 34000 MONTPELLIER) - Amphi 206 (Bât. 9 - Cœur d'école Niv.2)
La soutenance sera également accessible en distanciel via le lien suivant : https://institut-agro.zoom.us/j/92574407440?pwd=IsG0LCaoLWtSGvfKbLLZqQnxgDH9Lb.1
Composition du jury
Dr Marc Tchamitchian |
Directeur de recherches Écodéveloppement/Chef de département adjoint, département ACT, INRAE Avignon |
Rapporteur |
Dr Philippe Debaeke |
Directeur recherche au sein de l'UMR AGIR, INRAE Toulouse |
Rapporteur |
Pr. Safya Menasseri |
Enseignante-chercheur en Agronomie à l'UMR SAS, Institut Agro Rennes |
Examinateur |
Pr. Chiara Pistocchi |
Maitre de conférences en Sciences du Sol, Institut Agro Montpellier |
Encadrant |
Dr Crystele Leauthaud |
Chercheur CIRAD |
Encadrant |
Pr. Claire Marsden |
Maitre de conférences à l'UMR Eco&Sol, Institut Agro Montpellier |
Invité |
Résumé : En Afrique du Nord, les petits agriculteurs sont confrontés à de multiples contraintes, notamment une pression croissante sur les ressources naturelles, en particulier les sols et l’eau. À cela s’ajoute un accès limité aux engrais minéraux, souvent coûteux et parfois indisponibles, compliquant davantage la gestion des exploitations agricoles.
Face à ces défis, les agriculteurs développent des solutions innovantes. Parmi ces innovations, le thé à base de poudrette de fumier (HMT, pour Homemade dry Manure Tea) est largement utilisé. Cette pratique consiste à macérer du fumier séché dans l’eau, suivie d’une filtration. La solution obtenue est ensuite appliquée aux cultures maraîchères ou arboricoles, généralement via un système d’irrigation goutte-à-goutte. Bien que largement répandue en Tunisie, cette pratique reste encore peu étudiée scientifiquement. Dans ce contexte, cette thèse vise à combler le manque de connaissances sur les HMTs.
Le premier objectif est d’explorer la diversité des méthodes de fabrication utilisées par les agriculteurs et d’établir une typologie de ces pratiques.
Le second objectif est d’évaluer les effets agronomiques des HMTs sur des cultures modèles, en examinant leur potentiel en tant qu’alternative ou complément à la fertilisation conventionnelle. Une première expérimentation en chambre de culture a permis d’évaluer une recette spécifique de HMT sur la croissance d’épinards. L’application de HMT à une dose "paysanne" a produit des effets similaires à une dose équivalente de fertilisant synthétique en termes d’apports d’azote (N), de phosphore (P) et de potassium (K). En revanche, une dose élevée de HMT a inhibé la croissance. Pour mieux comprendre la diversité des méthodes de fabrication, 62 enquêtes ont été réalisées auprès d’agriculteurs répartis dans trois grandes régions bioclimatiques de la Tunisie. Une analyse des correspondances multiples suivie d’une classification hiérarchique a permis de distinguer quatre grandes catégories de recettes, différant selon le type et l’âge du fumier, le ratio eau/fumier, la durée de macération, l’aération éventuelle et l’ajout d’additifs. Afin d’évaluer les effets des différentes recettes, dix HMTs représentatifs de cette diversité ont été fabriquées et caractérisées en laboratoire (pH, CE, macro-et micronutriments), puis appliqués en serre sur des plants de tomate (Solanum lycopersicum L.). Les mesures de croissance (hauteur, biomasse sèche, phénologie) ont montré que tous les HMTs améliorent significativement la croissance des plantes, souvent plus efficacement qu’un apport de N minéral seul. L’effet des HMTs dépend néanmoins de leur composition, notamment du rapport P/N et de la disponibilité en phosphore. Les résultats confirment le potentiel agronomique des HMTs dans toute la gamme testée, tout en soulignant l’importance de maîtriser leur formulation et les doses appliquées.
Une gestion rigoureuse des pratiques de macération et des quantités appliquées est indispensable pour éviter des effets de toxicité. En conclusion, les HMT apparaissent comme un fertilisant organique artisanal prometteur. Ils peuvent se substituer, au moins partiellement, aux engrais minéraux et contribuer ainsi à une transition agroécologique de l’agriculture tunisienne, et plus largement, à celle d’autres régions du monde.