La Tunisie cherche à réorienter ses politiques d’aménagement et de conservation des eaux et des sols (ACES) afin qu’elles gagnent en efficacité, en s’appuyant sur des démarches participatives innovantes. Cette réorientation passe par le renforcement du dialogue entre les principaux acteurs des espaces ruraux concernés, agriculteurs et administration. Cependant, cette orientation s’inscrit dans des contextes ruraux souvent peu documentés où la dimension environnementale nécessite d’être objectivée. En plus, l'intensification agricole d’une agriculture irriguée en Tunisie centrale, engendre des impacts environnementaux locaux et régionaux, liés à une consommation accrue en intrants et ressources, dont l’eau et le sol. En faveur d'une agriculture plus durable et pour éclairer les politiques publiques de développement agricole, il est nécessaire d’évaluer les impacts des pratiques agricoles et d’aménagement, et ceci à l’échelle d’un territoire. La question est ainsi de savoir comment mettre en œuvre une démarche d'évaluation environnementale dans un contexte 1) de rareté de données fiables y compris statistiques, et de complexité des pratiques agricoles, 2) de proéminence des questions socioéconomiques sur les préoccupations environnementales 3) de méconnaissance de la perception des acteurs locaux sur ces questions et donc de difficulté à identifier des indicateurs pertinents et mobilisables.
Nous proposons une démarche participative originale conçue pour permettre de produire de l’information de qualité en valorisant les savoirs locaux, de partager et prendre en compte les perceptions des différents acteurs, et enfin de construire des consensus pour contribuer à l’élaboration de politiques d’ACES plus efficaces. L’évaluation mobilise un double dispositif comprenant des observateurs extérieurs et une enquête de satisfaction auprès des participants. Elle s’appuie sur une grille d’évaluation de cette démarche, de ses produits et des effets induits à court terme. La structuration progressive et adaptative de la démarche, les choix des acteurs, des lieux de réalisation des ateliers et le recours à un animateur neutre ont été des facteurs très importants pour satisfaire aux critères d’évaluation de la démarche. Le partage et la prise en compte des informations et des données collectées mais aussi des expertises et perceptions des différents acteurs a permis de produire des informations jugées satisfaisantes ou très satisfaisantes par la totalité des participants. Cela a nourri les connaissances de tous les acteurs et contribué à une dynamique constructive d’apprentissage collectif. L’engagement et la mobilisation des acteurs, en particulier nationaux, dans cet espace opérationnel de concertation sur les enjeux territoriaux, les pratiques agricoles et les ACES ont montré une trajectoire d’ouverture vers la décentralisation du pouvoir politique.
Mots clefs : Approches participatives, aménagement de bassins versants, conservation des ressources naturelles, agriculture, évaluation
Photos : Entre agriculture irriguée et pluviale, Amont du bassin versant de Mergulil©Houssem Braiki