Le déplacement de la frontière agricole vers des terres arides, aux conditions de plus en plus contraignantes, est analysé sous l'angle des acteurs, de leurs relations de pouvoir et de la façon dont ils contribuent à la recomposition de l'agriculture et des territoires égyptiens. Si les terres désertiques sont devenues le lieu de construction et d'expansion d'un nouveau secteur agricole dominé par une étroite élite entrepreneuriale, elles sont façonnées par un ensemble plus large d'intérêts. Elles constituent en effet un système de ressources (foncières et hydriques) et d'opportunités pour une diversité d'acteurs : politiques ; économiques et institutionnels ; publics et privés ; productifs et non productifs. Depuis les années 1950, ceux-ci se sont projetés sur les terres désertiques à la poursuite d'objectifs pluriels, qu'il s'agisse de légitimer leur position, d'accroitre leur pouvoir, d'accumuler du capital, mais aussi, dans le cas des plus fragiles économiquement et socialement, tout simplement de faire vivre et nourrir leur famille. Ce travail montre ainsi en quoi les espaces désertiques sont au cœur de processus de projection, d'appropriation et de négociation. Cette recherche, fondée sur environ 80 entretiens et sur des enquêtes menées principalement dans les marges du Delta du Nil (2012-15), s'inscrit dans trois champs de recherche en géographie : les dynamiques de front pionnier et la construction territoriale d'espaces à la limite de l'écoumène ; le renouvellement contemporain des acteurs de l'agriculture et l'essor d'un nouvel agro-capitalisme ; les rapports de pouvoir pour l'allocation des ressources.
Mots clés : Front pionnier ; Ressources ; Etat ; Agro-business ; petits producteurs ; arrangements ; agriculture traditionnelle - Egypte ; Ressources agricoles - Egypte - 1952-... ; Projets de développement agricole - Egypte ; Colonisation intérieure - Egypte ; Sol, Utilisation agricole du sol - Egypte.