Résumé de la thèse :
En 2012, l’État turc a lancé le programme « 1000 réservoirs en 1000 jours » pour développer l’irrigation à travers le pays. Cette thèse suit la trajectoire de ces objets (les gölet) pour étudier dans la région d’Izmir les dynamiques sociales, techniques et politiques de l’irrigation. Elle montre d’abord comment la dissémination de petits aménagements à l’échelle nationale matérialise le pouvoir étatique jusque dans les espaces ruraux, et comment l’administration hydraulique turque perpétue sa mission et renforce sa légitimité à travers ce programme. L’appropriation des gölet est ensuite étudiée dans deux villages où les agriculteurs utilisent déjà les eaux souterraines pour irriguer, collectivement à Bağyurdu et individuellement à Emiralem. À partir des adaptations techniques apportées aux systèmes irrigués, elle montre leurs manières de capter les ressources en fonction de l’histoire locale de l’irrigation. Enfin, les négociations et transactions entre les ingénieurs de l’administration et les irrigants sur les conditions de gestion de nouveaux gölet sont analysées dans dix localités. Cette « politique du quotidien » montre comment des dynamiques politiques locales et supralocales façonnent les arrangements sociaux autour de l’eau.
La thèse s’intéresse ainsi aux (re)configurations hydro-territoriales à l’œuvre à l’arrivée de nouvelles infrastructures, résultats temporaires de processus polycentriques et tensionnels entre différentes logiques de développement. Elle tisse des liens entre la political ecology et une géographie sociale et politique de l'environnement, entre le façonnage des territoires de l'eau et celui des relations État-société et contribue au débat sur la place du rural dans la géographie actuelle de l'État turc.
Mots clefs : Eau de surface, eau souterraine, retenues collinaires, périmètres irrigués, action publique, irrigation, hydrologie, agriculture
Photos : Retenue collinaire de Bağyurdu, district de Kemalpaşa (Izmir), utilisée par une coopérative d’irrigation qui distribue également de l’eau depuis des forages collectifs ©Selin Le Visage |
Selin Le Visage a soutenu le 16 décembre 2020 à 14h00, en visioconférence, ses travaux de thèse devant le Jury composé de :
- David Blanchon (directeur), Professeur, Université Paris Nanterre
- Anne Honegger (rapporteure), Directrice de recherche, CNRS
- Zeynep Kadirbeyoğlu (examinatrice), Maîtresse de conférences (Assoc. Prof.), Université du Bosphore (Boğaziçi üniv.)
- Marcel Kuper (directeur), Directeur de recherche, CIRAD
- Élise Massicard (examinatrice), Directrice de recherche, CNRS
- François Molle (rapporteur), Directeur de recherche, IRD